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L'homme riche ; le sens de la richesse (10,17-31)

Par Anselm_Grün

L'histoire de l'homme riche avait suscité en son temps l'inquiétude des disciples ; elle reste aujour­d'hui encore une pierre d'achoppement pour beaucoup de lecteurs, parce qu'elle semble exiger de nous que nous vendions tout notre avoir pour suivre Jésus. Pourtant Marc ne veut pas, en la racontant, édicter une norme fixant ce que nous avons le droit de posséder et ce que nous sommes tenus de vendre. Il vise plutôt à nous montrer, par cette rencontre personnelle d'un jeune homme riche avec Jésus, que celui qui veut suivre Jésus doit se libérer en esprit de tous les attachements. Ce jeune homme mène une vie correcte, il obéit à tous les commandements. Jésus le regarde et se prend d'affection pour lui ; il reconnaît que cet homme est appelé à faire autre chose encore que simplement observer les commandements de Dieu. «Il ne te manque qu'une chose. Va vendre tout ce que tu possèdes et donne-le aux pauvres. Tu posséderas un trésor dans le ciel. Puis suis-moi» (10,21). Jésus sent qu'il y a autre chose encore chez ce jeune homme et, en le provoquant, il cherche à faire sortir ce qu'il y a en lui.

Vendre tout ce que l'on possède n'est pas une norme imposée à tous ceux qui veulent suivre Jésus. Il s'agit plutôt ici d'inciter cet homme à s'engager sur le chemin où il pourra réaliser ses vraies aptitudes et toutes ses possibilités. Ce riche-là serait vraiment libre s'il vendait son avoir. Pour d'autres êtres qui suivent Jésus, il n'est pas nécessaire de se séparer de leur avoir mais plutôt peut-être de leurs succès, de leur image de Dieu ou d'eux-mêmes, de l'idée qu'ils se font de la vie, de leurs habitudes, de leurs relations. Qui lit cette histoire doit se présenter à Jésus avec tout ce qu'il a, et lui tendre son cœur ; il saura alors ce qui l'empêche de vivre. De quoi ne pouvons-nous pas nous déprendre ? Il s'agit parfois d'un schéma existentiel qui certes me cause du tort, mais auquel je m'accroche parce qu'au moins je sais où j'en suis ; si j'y renonçais, je ne le saurais plus. Or l'inconnu fait peur, la peur m'inhibe et m'empêche d'être libre. Chez ce jeune homme, la peur était plus forte que l'aspiration à la vie éternelle, la seule vraie, il s'en va donc tristement. Cette histoire nous engage à ne pas nous en aller tristement, comme lui, mais à nous dégager de ce qui nous lie ; alors nous ferons, en suivant Jésus, l'expérience d'une immense liberté.

Bien que possédant fort peu de biens, les disciples de Jésus sont consternés par ce qu'il a dit du danger des richesses. Jésus répond à leur accablement en accentuant encore la provocation : « II est plus facile à un chameau de passer par le trou de l'aiguille qu'à un riche d'entrer dans le Royaume de Dieu ! » (10,25). Par cette parole destinée à choquer, il n'entend pas condamner la richesse en elle-même, car elle n'est pas intrinsèquement mauvaise ; elle vient en effet de Dieu, qui est riche et nous fait participer à sa richesse. Elle est pourtant dangereuse : nous risquons de nous identifier à elle, de nous dissimuler derrière elle comme derrière un masque épais. Elle nous empêche d'accéder à notre vérité, à notre Soi. Nous pouvons certes compenser notre sentiment d'infériorité en accumulant sans fin les possessions, mais notre Soi est bloqué dans son développement, nous n'avançons plus, nous nous pétrifions intérieurement. Les possessions peuvent faire de nous des possédés ; nous sommes alors déterminés par une avidité insatiable. Qui est ainsi sous l'empire de la richesse est incapable d'accéder au Royaume, car il refuse de se laisser déterminer par Dieu : il sert un autre maître.

Comme les disciples sont effrayés par cette radicalité de Jésus, il leur indique une autre éventualité : «Pour les hommes, impossible, mais non pour Dieu : car tout est possible pour Dieu» (10,27). Dieu peut encore toucher le cœur des riches, et l'ouvrir au Royaume. Même celui qui reste attaché à ses biens peut en être soudain libéré par une expérience bouleversante ; il comprend alors qu'il y a d'autres valeurs, que le but de sa vie n'est pas la richesse, mais l'accès au Royaume de Dieu ; que la vraie richesse, c'est de se laisser déterminer et façonner par Dieu.

À ces paroles de Jésus sur la richesse, Pierre donne une réponse grandiloquente : ils ont, les autres disciples et lui-même, tout abandonné pour le suivre. À ceux qui ont ainsi tout quitté, Jésus promet que dès ici-bas ils le recouvreront au centuple. Les disciples ont abandonné leurs familles et leurs biens pour parcourir le pays avec lui et proclamer partout la Bonne Nouvelle après sa mort et sa Résurrection. Quitter sa maison, cela signifie pour moi se séparer sans cesse de tout ce qui me donne l'impression d'être chez moi. Je ne peux pas me créer ici un domicile définitif, et je ne peux le trouver en Dieu que si je me détache de mes séjours extérieurs ; je me sentirai alors partout chez moi. Quitter frères et sœurs, amis et amies, telle est la condition pour goûter les joies de la communauté qui nous est sans cesse offerte à nouveau. Seul pourra vivre sa vie propre et reconnaître les racines positives qu'il tient de ses parents celui qui quitte père et mère et prend une distance par rapport à leurs voix qui parlent en lui. Les enfants sont l'image de ce qui se développe en nous, des fruits portés par notre vie. De tout cela aussi nous devons nous détacher, afin que des fruits nouveaux puissent encore mûrir en nous. Pour goûter avec reconnaissance ce que Dieu nous offre, il nous faut prendre du recul par rapport aux richesses ; qui se crispe sur ses possessions ne peut même pas en jouir. Tout ce que Dieu nous octroie ici-bas, nous le recevons dans les persécutions, dans les conditions restrictives du monde, et cela peut donc toujours nous être repris sans que nous ayons le pouvoir de le retenir. En tout ce que représentent pour nous père, mère, frères, sœurs, maison, enfants, propriété terrienne, il y a une promesse qui ne sera vraiment tenue que dans la vie éternelle. En elle nous serons pour toujours chez nous, et nous connaîtrons l'épanouissement de la communauté.

Chacun fera à sa manière l'expérience de l'abandon et de la gratification. Celui qui renonce à toute propriété personnelle dans un ordre monastique constate souvent qu'il manie plus d'argent que ses frères et ses sœurs ; qui mène une vie professionnelle et familiale sans s'attacher aux biens matériels verra souvent lui aussi qu'il a bien assez et que sans cesse lui sont dispensées de nouvelle joies. En revanche, celui qui place sa valeur personnelle dans ses possessions ne recevra jamais assez ; jamais il ne sera reconnu comme il aurait besoin de l'être, et jamais il ne sera satisfait. C'est en ce sens que Jésus nous enseigne à laisser derrière nous tout ce qui nous empêche de le suivre. Il faut avoir atteint la liberté intérieure pour comprendre où il veut nous conduire, vers le Royaume de Dieu, un espace où l'être humain découvre sa véritable nature, où Dieu lui-même lui donne sa forme et l'emplit de sa magnificence.


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Modifié le  14-02-2012.