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L’entretien avec Nicodème (3,1-13)

Anselm Grün

Nicodème est un Juif pieux, préoccupé par le problème du salut. La question de la réussite de la vie, de son intégrité, de sa complétude ne se pose pas aux seuls Juifs : elle est aussi typiquement celle des Grecs, et sans doute de chaque être humain en tout temps. Nicodème va voir Jésus la nuit. Chez Jean, les indications temporelles sont toujours chargées de sens symbolique. La nuit représente ici les ténèbres intérieures, l'occultation du sens. C'est dans ce tourment que Nicodème vient à Jésus pour recevoir de lui une réponse à ses questions existentielles. Cependant, il dissimule sa question, constatant que Jésus est à l'évidence envoyé par Dieu. Il pressent qu'il y a en cet homme autre chose que chez les maîtres qui parlent de Dieu mais ne sont pas ses envoyés. Jésus, lui, perçoit la vraie préoccupation du questionneur, et avant même que Nicodème ait formulé sa question, il pose le vrai problème de son interlocuteur en affirmant : « Eh bien oui, répond Jésus, je dis qu'il faut être né là-haut (anôthen) pour voir le Royaume de Dieu» (3,3). L'ambiguïté de cette parole est assurément voulue. Seul peut voir le Royaume de Dieu celui qui naît d'en haut, de Dieu, seule sa vie est sauvée. Il est arraché au monde des apparences ; le monde, avec ses exigences et ses attentes, est sans pouvoir sur lui. Il ne s'agit pas là seulement de la double origine de l'homme, né tout à la fois de la terre et de Dieu, mais aussi de l'évocation de la renaissance.

Au Ier siècle, les religions à mystères connaissaient ce thème. Le sanctuaire de Mithra que l'on peut visiter aujourd'hui encore, à Rome, sous la basilique San Clemente, nous donne à voir clairement comment il était compris. Le candidat à l'initiation descendait dans la fosse et y était aspergé du sang du taureau sacrifié, qui le purifiait de tous ses péchés. Il mourait au monde, et il lui était donné de ressortir de la fosse régénéré, divinisé. Les gnostiques étaient aussi familiarisés avec le thème de la renaissance, événement pour eux inexplicable, inexprimable, dont le résultat était l'illumination où l'on se voyait soi-même en Dieu. La renaissance est une image du cheminement intérieur qui mène l'être humain vers sa véritable identité, le Soi. Ce processus se déroule de façon différente selon les êtres ; on ne peut pas vraiment l'observer, mais le but en est toujours le même : « le moi en tant que faux centre de la personnalité est remplacé par un centre nouveau, le vrai» (Sanford 1, p. 106). Nicodème ne comprend pas, parce qu'il prend cela à la lettre, en surface. Jésus l'oriente vers une autre dimension, celle de la profondeur spirituelle : «Ce qui est né de la chair est chair, ce qui est né de l'esprit est Esprit» (3,6). C'est l'origine de l'homme qui importe pour Jean. Qui est né de la chair se conçoit lui-même comme chair, c'est-à-dire se définit selon les critères de ce monde; qui est né de l'Esprit procède de Dieu et se conçoit lui-même comme tel. La renaissance est l'éveil spirituel à la vraie réalité. Mes yeux s'ouvrent; j'ai du monde et de moi-même une compréhension nouvelle. « La naissance spirituelle rend l'homme capable de voir dans le temps la présence de l'éternité, dans l'histoire la fin de l'histoire, et dans le Christ incarné en l'homme le divin lui-même » (Leong, p. 83).

Aujourd'hui, le mot «renaissance» fait souvent penser à une réincarnation après la mort ; il n'en est pas question ici. La véritable nature de l'homme, c'est d'être né de Dieu. Cela ne signifie pas simplement que l'homme est une créature de Dieu; cela, tout homme l'est. Celui qui est né d'en haut, de l'esprit, se conçoit lui-même comme ayant son fondement ultime en Dieu même. Renaître, ce n'est pas devenir moralement meilleur, c'est entrer en contact avec cette véritable origine. Être né de la chair seule, c'est être aliéné de cette origine, ne pas se comprendre soi-même, végéter au fil du temps. La renaissance à partir de l'esprit, Bultmann la conçoit comme « une façon d'être où tout homme est dans son authenticité, se comprend et ne se sent plus accablé par son néant» (Bultmann, p. 100).

À la question de savoir comment nous représenter le processus de la renaissance, Jésus répond par une énigme évoquant le mystère du pneuma, qui désigne en grec à la fois le vent et l'esprit : «Le vent souffle où il veut, tu entends sa voix sans savoir d'où il vient ni où il va. Ainsi va tout homme né du Souffle» (3,8). La renaissance est aussi incompréhensible et mystérieuse que le vent, insaisissable et non maîtrisable, et se manifestant pourtant à ses effets. Qui est né de Dieu se comporte autrement, de lui émane un autre rayonnement ; il est libre, il est vivant, traversé par un torrent de vie.

En dépit de cette indication, Nicodème pose à nouveau sa question : « Comment faire ? » (3,9). Jésus le renvoie alors du plan terrestre au plan céleste ; de la renaissance, on ne peut pas parler comme d'une réalité visible. Seul peut nous informer vraiment sur l'origine de notre existence celui qui, venu du ciel, est descendu vers nous : Jésus, le Maître, l'initiateur. Je ne peux répondre réellement ni à la question de l'origine ni à celle de ses modalités, mais le seul fait de la poser me libère des problèmes qui me retenaient prisonnier et produit déjà un effet salvateur. Je vois que je suis pour moi-même ce mystère : ma véritable origine, c'est le ciel ; je ne peux décrire cela avec des notions terrestres, mais savoir que mon centre est de nature spirituelle me permet de ne plus toujours graviter autour de la surface des choses. Ce qui règne en moi, ce n'est plus l'ego centré sur lui-même ; c'est le vrai Soi, dans lequel s'est empreinte l'image de Dieu et qui se soustrait à toute connaissance humaine.


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Modifié le  14-02-2012.